Bluebird – Tristan Koëgel

De l’autre côté de l’Atlantique le monde s’embrase et se consume dans une guerre de plus. Or c’est à peine si ces échos parviennent jusqu’aux comtés du sud des États-Unis, trop occupés à maintenir la ségrégation raciale sur leur territoire. Et ce sont sur ces routes qu’avancent Minnie et son père, musiciens itinérants, jouant de plantations en plantations. Aujourd’hui si les ouvriers ont remplacé les esclaves, les conditions de travail sont à peine différentes.

Et si la musique pouvait changer quelque chose ? Une musique terrible, symbolisant, ou plutôt concentrant toute la souffrance d’un peuple brimé, pour que le temps d’une soirée la douleur s’évapore, s’envole, disparaisse. Même si elle doit revenir le lendemain, plus présente que jamais. Ça pourrait être ça le blues, une musique d’opprimés qui peuvent rire entre les larmes. Alors c’est ce que fait Minnie avec son père, rire malgré tout et avancer, le temps d’un roman, dans l’Histoire, quitte à souffrir, quitte à tomber amoureuse…

Mais si, au premier abord, ce livre ressemble à la naissance d’une histoire d’amour, très vite l’auteur fait prendre un virage radical à ses personnages, les propulsant loin de ce qu’on pourrait attendre d’un roman dédié à la jeunesse. L’alternance des points de vue entre différents protagonistes lui donne une dimension fabuleuse, illustrant avec brio les nuances troubles des émotions de nos narrateurs, personnages complexes, solides, charismatiques en pleine évolution, ou même en pleine révolution ! Car c’est bien l’affranchissement total qui tisse le fond d’un roman aussi coloré que le bonheur sait l’être.

Mention spéciale pour la postface, qui confirme tout le talent de l’auteur en une seule page, et met particulièrement bien en avant la modestie propre aux vrais bluesmen. Ça et bien sûr une liste de chansons à écouter tout au long de la lecture, imprimée sur le rabat de la couverture, qui rend l’expérience d’autant plus intéressante… Que dire de plus, sinon que ce livre est magnifique ?


Bluebird, Tristan KoëgelDidier jeunesse,14,20 €

ThebluesCarlo

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